De retour…

Vue de la piste par la vitre du taxi

photographie : ninachani

Ça fait une semaine que je suis de retour en France mais par moments j’ai l’impression de ne pas être complètement rentrée.

Cette photo résume assez bien mon voyage : les taxis brinquebalants, la pluie, la boue rouge qui colle aux chaussures, les pistes embourbées, Jésus omniprésent et une végétation foisonnante. Bien sûr il y manque la corruption qui gangrène tout le système, les hôpitaux où les rats gambadent et où il faut payer à chaque fois qu’on veut que l’infirmière examine ton bébé malade ou qu’elle lui fasse une piqûre, le sens de la formule des Camerounais et leur génie de la métaphore, le courage des résistants Upécistes depuis des décennies, les innombrables bières qu’hommes comme femmes ingurgitent quotidiennement, peut-être pour oublier que ce qui les entoure est bien la dure réalité,  le rat grillé comme mets de choix, les coupures d’eau et d’électricité, la connaissance encyclopédique des Camerounais pour tout ce qui concerne la politique y compris les débats franco-français…

Toutes ces rencontres, toutes ces demandes d’aide pour sortir d’un certain isolement provoqué par la pauvreté, le mépris occidental et la colonisation.

Je suis fatiguée et me sens désarmée devant tout ça.

J’ai mené à bien ce que je voulais faire. J’ai photographié certains sites où ont été perpétrés des massacres par le pouvoir colonial et j’ai rencontré des personnes qui en ont été victimes, témoins ou qui ont fait partie du mouvement de résistance face à la colonisation française, qui ont participé à la lutte armée pour certains. Abnégation, courage, endurance. Il faut aider, soutenir, financer les initiatives politiques contestataires et dissidentes qui ne manquent pas là-bas plutôt que de se donner bonne conscience en donnant de l’argent pour nourrir les « pauvres petits Africains ». La libération passera par la lutte politique menée par les principaux concernés et non pas par un paternalisme occidental de circonstance qui ne mène qu’à la reproduction de schémas de domination coloniale.

3 Commentaires

  1. valegnu

    J’aime beaucoup cette image, avec l’essuie-glace. Cela donne vraiment l’idée d’une clarté à récupérer avec ce voyage et, en même temps, de quelque chose qu’on n’arrive pas totalement à éffacer,et peut être on le ressent dans ton impréssion de n’être pas encore revenue. Le Jesus dans le coin de la vitre me fait penser beaucup aux chapelets ou Vierges dans les taxis aux Portugal, aux Buddhas dans les taxis thailandais et aux Maradona dans les taxis napolitaines.

  2.  » l’idée d’une clarté à récupérer avec ce voyage »
    Euh, dis, tu lis dans ma tête ou quoi? Parce qu’en terme de clarté à récupérer c’était un peu l’objectif principal de ce voyage et de ce projet plus globalement pour le côté personnel en tout cas.

  3. Dominique

    Est-il possible voire souhaitable de rentrer indemne d’un « voyage ».
    Félicitation pour tes photos et ton courage.

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